Écrasé par la domination américaine de la NASA et de SpaceX, l’aérospatial européen patine. Pour pallier ce déséquilibre, le président français a décidé de financer les projets de fusées de quatre start-ups françaises pour faire émerger un nouvel acteur européen du secteur.
Trois lancements de fusées contre 107 pour SpaceX : l’aérospatial européen patine en 2023 contre le géant américain. Avec deux Ariane 5 en avril et juillet puis une Vega en octobre 2023, les fusées européennes ne peuvent pas tenir la cadence infernale imposée par Elon Musk, dont l’entreprise est largement subventionnée par la NASA et le Pentagone. Pour rattraper ce retard colossal dans la course à l’espace, Emmanuel Macron a annoncé le 24 mars dernier avoir sélectionné quatre projets de développement de fusées privées qui seront soutenus financièrement par l’État français.
Les heureux élus sont divisés en deux catégories : d’un côté les projets de microlanceurs de Latitude et HyprSpace, de l’autre les projets de lanceurs réutilisables de Sirius Space et Maiaspace. Les premiers doivent mettre au point des fusées capables de mettre en orbite de petites charges utiles (entre 100 et 200 kg), les seconds des modèles avec une capacité de stockage entre 500 et 1500 kg, tout en étant capables de revenir se poser sur Terre afin d’effectuer de nouveaux vols.
Imprimante 3D et nanosatellites
Le prototype de Latitude, start-up rémoise fondée en 2019, est baptisé Zéphyr. Mesurant 19 mètres de haut pour un diamètre d’à peine 1,50 mètre, celui-ci est trois fois plus petit que les Ariane ou les Falcon de SpaceX. Avec des moteurs produits par imprimante 3D, Zéphyr doit permettre de développer le marché des nanosatellites, ces touts petits modèles pesant environ 40 kilos et n’étant pas plus grands qu’une boîte à chaussures. Basée en Gironde, HyprSpace a elle développé un micro lanceur de 16 mètres de haut capable de transporter ces mêmes nanosatellites ultralégers.
Mais contrairement aux fusées classiques utilisant une technologie de propulsion à base d’oxygène liquide, HyprSpace cherche à construire le premier moteur hybride, combinant réactifs liquides et solides, en brûlant notamment des déchets plastiques contenant du polyéthylène recyclé. Pour aussi ambitieuse qu’elle soit, la start-up a su garder une certaine légèreté en nommant son projet PADA1 (prononcer padawan) et sa fusée Orbital Baguette One (OB1 ou Obi-wan).
Orbite basse
Du côté des projets de fusées réutilisables, l’État a décidé de sélectionner la filiale d’Arianegroup Maiaspace. L’entreprise fondée en 2021 à Vernon en Normandie a pour objectif de concevoir le premier lanceur européen réutilisable. Avec un corps en acier et non en traditionnel mais onéreux aluminium, le prototype de MaiaSpace doit être capable d’emporter une charge utile d’1,5 tonne s’il reste en orbite basse mais d’au moins une demie tonne s’il doit revenir sur Terre. Quant à Sirius Space, basée à Puteaux, trois lanceurs sont en phase de développement. Sirius 1, 13 et 15 doivent tous trois être capables de lancer des satellites de 800 kilos et de faire le chemin dans le sens inverse.
Choisis dans le cadre du plan d’investissement France 2030 qui doit dynamiser le secteur industriel de pointe du pays, les quatre lauréats ne seront en revanche pas subventionnés directement mais simplement financés pour le premier décollage de leur prototype. L’objectif est avant tout de faire émerger un acteur pouvant concurrencer à terme avec SpaceX. Mais les décollages depuis le port spatial de Kourou en Guyane ne devraient pas avoir lieu avant 2026-2027. En attendant ces innovations françaises, le président de la République mise aussi sur le lancement d’une fusée Ariane 6 pour le début de l’été 2024.