Étiqueter les réseaux sociaux d’un avertissement pour les mineurs, comme pour le tabac ?

Illustration Shutterstock
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En appelant le Congrès américain à étiqueter les réseaux sociaux d’un avertissement, l’administrateur de la santé publique des États-Unis, Vivek Murthy, souhaite s’inspirer de la lutte anti-tabac.

Ils étaient encore 23,3 % d’adolescents américains en 2000 à fumer régulièrement. Vingt ans plus tard, ils ne sont plus que 2,3 %, selon une étude de l’Université du Michigan. En France, si la diminution est moins évidentes (de 25,1 à 15,6 % chez les moins de 17 ans), c’est aussi en raison d’une législation moins restrictive qu’aux États-Unis, où il est interdit de fumer jusque dans les centres villes, et où les prix peuvent grimper jusqu’à 18 euros pour l’achat d’un paquet. Parmi ces mesures drastiques, l’étiquetage des paquets de cigarette pour avertir des dangers sanitaires du tabagisme a aussi contribué à sa diminution chez les jeunes, les rendant moins attractifs.

Partant de ce constat, Vivek Murthy, l’administrateur de la santé publique outre-Atlantique, a lancé un appel au Congrès américain pour étiqueter les réseaux sociaux d’un avertissement, comme c’est le cas pour les paquets de cigarettes.

Dans une tribune publiée dans le New York Times ce lundi, il explique : « La crise de santé mentale chez les jeunes est une urgence, et les réseaux sociaux sont devenus un contributeur important. Les adolescents qui y passent plus de trois heures par jour courent le double du risque d’anxiété et de symptômes de dépression, et l’utilisation quotidienne moyenne dans ce groupe d’âge, à partir de l’été 2023, était de 4,8 heures. En outre, près de la moitié des adolescents disent que les réseaux sociaux les font se sentir plus mal dans leur corps. »

Un cap supplémentaire

En France selon une étude de l’agence Heaven et de l’association Génération numérique, les chiffres tendraient à démontrer une diminution de la fréquentation des réseaux sociaux chez les moins de 13 ans (71% en 2023 contre 86% en 2022). En cause : la multiplication des campagnes négatives à leur encontre, notamment sur le harcèlement en ligne, et des parents plus attentifs, ont largement contribué à cette chute.

L’idée d’un étiquetage pourrait permettre de passer un cap supplémentaire dans la prise de conscience des dangers d’une utilisation trop poussée de ces plateformes chez les plus jeunes. « Pourquoi n’avons-nous pas réagi aux dommages causés aux médias sociaux alors qu’ils ne sont pas moins urgents ou répandus que ceux posés par les voitures, les avions ou la malbouffe ? » interroge-t-il dans cette tribune. D’où l’idée de traiter le problème de la même manière que tous les autres problèmes de santé publique.

Limitation et interdiction contournées

« Les données issues des études sur le tabac montrent que les étiquettes de mise en garde peuvent accroître la sensibilisation et modifier les comportements » ajoute-t-il. Si aux États-Unis une loi fédérale interdit l’inscription sur les réseaux sociaux des adolescents de moins de 13 ans, ceux-ci ont facilement trouvé la parade pour la contourner. Tout comme la limitation du temps passé sur TikTok – paramétrée à 60 minutes par défaut pour les moins de 18 ans – largement contournée en utilisant un simple mot de passe.

En France, un texte de loi adopté en juillet 2023 préconise leur accessibilité à partir de 15 ans, âge de la majorité numérique. En 2023, Vivek Murthy avait déjà émis des préconisations à l’intention des décideurs politiques dont il avait reçu un soutien autant du camp démocrate que républicain. Si cette idée d’étiquetage fait son chemin au Congrès, elle pourrait aussi s’inviter dans le débat politique en France dans les prochains mois.