Deux comptes deepfake de fausses nièces des politiciennes du RN et de Reconquête ont surgi sur TikTok ces dernières semaines. Avant d’être bannis, ces profils frauduleux comptabilisaient des millions de vues au service d’une glamourisation de l’extrême-droite.
Jusqu’au 13 avril 2024, les comptes de Léna Maréchal et Amandine Le Pen comptabilisaient plus de 30 000 abonnés chacune sur TikTok, certaines vidéos dépassant 10 millions de vues. Sur la plateforme chinoise, les deux jeunes femmes mettaient en scène leur quotidien : vacances à la plage, ski, shopping ou verre en terrasse. La particularité de ces deux comptes ? Les deux femmes n’étaient autres que des deepfakes de Marion Maréchal et Marine Le Pen, rajeunies pour donner l’illusion d’en être les nièces.
Pendant plusieurs semaines, ces comptes ont circulé sur le réseau social préféré des jeunes. Dans chaque vidéo, les jeunes femmes reprennent les codes des vidéos d’influenceuses mais les accompagnent de messages politiques plus ou moins subtils et à caractère raciste : « J’espère que je ne vais pas trop bronzer », « Pas mieux que de se réveiller et de voir que tout est blanc de neige » ou encore « Mohamed c’est le mec qui insulte le RN, mais qui finit dans mes DM ». En plus de cette xénophobie décomplexée, les deux fausses influenceuses ajoutent des hashtags comme « Lepen », « RN » ou « Famille », presque toujours suivis de drapeaux français. Dans certaines de ses vidéos, Amandine Le Pen se déguise même en Jeanne d’Arc, appelle à « défendre la France » et à voter pour le RN et Jordan Bardella aux élections européennes de 2024.
Auteurs difficiles à identifier
Malgré la popularité de ces comptes frauduleux et la qualité étourdissante des sosies rajeunies par l’intelligence artificielle, plusieurs indices ont permis de révéler la supercherie. Sur certaines vidéos, le visage et en particulier la bouche bougent de façon peu naturelle. Mais l’élément essentiel reste que ces deux jeunes femmes ne parlent dans aucune des vidéos. Avec ce succès, les publications des deux comptes sont remontées jusqu’aux deux partis d’extrême-droite, sans que cela ne suscite d’approbation.
Sur BFM TV, l’eurodéputé Philippe Olivier a dénoncé « tout ce qui est faux », ajoutant que la circulation de ces vidéos n’avait pas plu à la famille Le Pen. Sarah Knafo, la conseillère d’Éric Zemmour, a elle déclaré avoir signalé le compte de Léna Maréchal. Une démarche quasiment vaine tant les auteurs de ces vidéos truquées sont difficiles à identifier. De plus, malgré ces dénonciations officielles, la popularité de ces comptes frauduleux fait le jeu de l’extrême-droite à l’approche des élections européennes en juin 2024, participant de fait à la dédiabolisation si ce n’est la glamourisation des deux partis. Pour limiter la propagation de ces deepfakes, le Parlement a voté le 10 avril 2024 une loi les encadrant strictement. Sans le consentement de la personne, une telle vidéo sera passible de deux ans de prison et 45 000 euros d’amende.
